i feel safe in the 5 am light ☄ (ft. lou)

Lumière artificielle qui allait et venait, éclipsait les rayons faiblard de cette bille flamboyante qui s'étalait et s’éteignait à l'horizon, les notifications s'écrasaient, se battaient, témoignant d'un appétit naissant. Elle approchait, l'heure. Il pouvait les entendre gronder au loin, au quatre coins de la ville, au détour d'une rue, en haut, dans ces immeubles qui se dressaient bien haut vers le ciel. Les murs tremblaient presque au son des estomacs en furie. Ulrich, il préparait son destrier de taule froissée à la course infernale qui l'attendait. Un bout de mort pincé entre les deux lèvres, les yeux rivés sur son écran, le garçon, il guettait la bonne adresse, la bonne proie, la bonne commande, celle qui lui remplirait les poches. De parfaites petites bulles bien rangées défilaient, et le flux s'intensifiait, et les ténèbres inondaient la ville. Il attendait. Il attendait que le ciel, rougit des pâles lueurs du crépuscule, ne devienne qu'un voile sombre et froid pour démarrer sa course. Un mégot jeté à ses pieds comme une vieille maîtresse trop usée, délaissée, son corps qui se glissait avec une grâce presque féline dans sa carcasse de fer, une chorégraphie qu'il ne connaissait que trop bien et qui, malheureusement, marquait le début d'une longue série de rencontres. Le halo des phares, furtif, courrait sur les murs, aveuglait les passants, on se languissait souvent d’apercevoir ces deux yeux vifs chatouiller les vitres de leur chaude lueur. Ils annonçaient la fin d'une attente interminable. Celle d'estomacs aux râles incessant. Ses phalanges s'étaient écrasées sur un millier de portes dans une mélodie redondante. Les mots qui résonnaient entre les murs, le suivaient, se perdaient aux oreilles bien souvent inattentives des clients, et les sourires, simple formalité, rien de très vrai. Belle comédie pour quelques sous à peine. Il sillonnait les longues artères, fendait les airs, la gomme s'arrachant au bitume. Les aiguilles, elles, soutenaient le rythme, ne s'arrêtaient pas, elles trottaient, défilaient, avançaient dans la nuit, tandis que les âmes s'endormaient bien haut dans leurs châteaux ne se souciant que très peu des fourmis qui grouillaient et s'agitaient à leurs pieds. Parfois, Ulrich, il les maudissait de se laisser tomber dans les bras de Morphée, de se lover dans leurs draps frais tandis qu'à côté d'eux, le monde nocturne s'activait, se tuait presque pour une misère.
Les dernières fenêtres s'éteignaient lentement tandis que les oiseaux de nuit s'extirpaient de leurs nids pour s'aventurer timidement dans les rues. Quelques âmes courageuses, bien peu impressionnées par les derniers évènements se perdaient ici et là, dans les bars, chez des amis, chez des amants. Le garçon, lui, voyait son service toucher à sa fin. Il pouvait déjà entendre son foyer l'appeler, lui hurler de revenir, de s'enfermer, de se protéger du monde qui naissait sous ses deux billes pétillantes. Ses phares qui mourraient pour quelques heures à peine, son corps tirée de son épave et un dernier rouleau de mort pour la route. La flamme artificielle chatouillait le bout de sa cigarette qui rougissait et s'embrasait tandis que ses yeux s'échouèrent sur une silhouette qui ondulait au loin. L'attente. La confusion. Le saut. « Lou ? » Au pire, il s'écraserait contre une violente bourrasque, au mieux, il appellerait la bonne personne.